Voilà dix jours que les participants du Vendée Globe ont largué les amarres. Raphaël Domjan (à gauche sur la photo ci-dessous), lui, rêve d'un autre tour du monde. En 2010, ce navigateur suisse s'élancera pour une boucle de 40 000 kilomètres sur PlanetSolar, un catamaran propulsé à l'énergie solaire. Une première mondiale pour cet ingénieur de 36 ans dont les premiers ronds sur l'eau remontent à l'adolescence, sur le lac de Neuchâtel. « J'ai envie de démontrer que l'énergie solaire n'est pas une technologie de laboratoire, qu'elle fonctionne aussi pour des usages tout public ».
Son projet débute en 2003. Sans un sou et sans véritable réseau, Raphaël Domjan frappe à toutes les portes : études de faisabilité, rencontres avec des scientifiques, démarchage de partenaires financiers... Son abnégation paye. Le projet suscite l'intérêt des spécialistes et des mécènes. Mieux, PlanetSolar se trouve un parrain prestigieux en la personne de Gérard d'Aboville (à droite sur la photo ci-dessous). « Raphaël m'a contacté et j'ai voulu en savoir plus. C'est notamment l'aspect navigation qui m'a attiré parce qu'il permet d'aborder de nouveaux paramètres ». Le célèbre navigateur deviendra finalement co-skipper de l'embarcation.
Un incroyable défi
Mais au-delà de l'aventure humaine, le projet PlanetSolar est avant tout un challenge technologique. Celui de construire le plus grand bateau solaire du monde : 30 mètres de long, 470 m2 de surface photovoltaïque, 10 noeuds de moyenne ; le tout pour une dépense d'énergie ne dépassant pas celle d'un scooter. Bref, un véritable casse-tête pour l'équipe d'ingénieurs qui a dû déterminer les mensurations du navire en fonction du parcours.
Car PlanetSolar doit résoudre une équation a priori impossible : utiliser peu d'énergie mais être solide et rapide. La propulsion du catamaran, la conception des panneaux solaires et le stockage de l'énergie sont autant de défis à relever. « Chaque gain d'efficacité est déterminant. On travaille notamment sur un système de grandes hélices qui apportent 80% de rendement contre 10 à 50% habituellement, précise Raphaël Domjan. Plus globalement, PlanetSolar crée des problèmes industriels énormes. La charge de batterie représente par exemple 5 à 6 mois de production d'une usine de batteries. »
Le choix du fournisseur de dalles solaires est imminent. On sait d’ores et déjà que les panneaux offriront un rendement de 22% et qu’ils généreront une puissance de 103,4 kilowatts (138,7 chevaux). Cela, sachant que les moteurs consommeront une puissance moyenne de 20 kilowatts (26,8 chevaux). Pour le stockage de l’énergie, le projet PlanetSolar fera appel à une batterie lithium.
Dernier élément : la navigation. Durant leurs 120 jours de périple, les deux skippers devront jouer avec les éléments pour maintenir leur production d'énergie. Ils bénéficieront dans cette tâche d'un logiciel dédié. Lequel étudiera l'état des vents et de l'ensoleillement pour déterminer la façon la plus économique de relier un point A à un point B. Quitte à emprunter des voies d'habitude délaissées par les navigateurs.
Un bateau d'avenir
Pour ses créateurs, PlanetSolar est une occasion unique de promouvoir l'énergie solaire, comme le résume Gérard d'Aboville : « C'est une démonstration exceptionnelle de ce qu'on peut faire avec des panneaux solaires, un fait marquant dans l'histoire des énergies renouvelables. Un peu comme la tour Eiffel en son temps a démontré la solidité de l'acier. ». Ainsi, certaines innovations du PlanetSolar pourraient trouver prochainement des débouchés dans l'univers maritime et notamment pour la pêche artisanale.
En attendant, la phase cruciale de fabrication du catamaran débutera en décembre pour 12 mois, suivie de 3 mois de test avant le grand départ en Méditerranée. A l'issue de son périple, PlanetSolar sera reconverti en yacht par Immo Ströher, mécène du projet. De quoi prouver, d'une toute autre façon, les bienfaits de la propulsion solaire.
Baptiste Roux Dit Riche
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Une animation en 3D pour découvrir le PlanetSolar
Les grands frères du PlanetSolar
* Les pionniers
Si le bateau solaire a le vent en poupe, il n'en est pourtant pas à ses tout débuts. Depuis les années 80, plusieurs projets d'embarcation ont déjà utilisé cette technologie. C'est le cas du très expérimental Solar Glisseur de Roger Martire présenté au salon nautique de Paris en 1982. Plus proche de nous, le Solar Sailor a été mis à l'eau en 2000. Pour naviguer dans le port de Sydney, ce ferry combine énergie solaire et éolienne, afin de réduire sa consommation de carburant.
* L'autre « recordboat » : le Sun21
Un autre catamaran solaire suisse pour une autre première mondiale : la traversée de l'Atlantique. Le 8 mai 2007, le Sun21 de l'association « Transatlantic21 » reliait New-York après un périple de 7000 miles marins. Ce bateau de 14 mètres de long s'est depuis offert une seconde vie. Il est désormais au service du WWF Adena/Madrid dans le cadre de recherches scientifiques.
* Pour le tourisme : l'Aquabus
Commercialisé par la société MW-Line, l'Aquabus est une solution propre et économique pour les transports de touristes sur des plans d'eau ou à proximité des côtes. Disposant d'une propulsion hybride (électrique et solaire), l'Aquabus est proposé dans différents modèles en fonction des utilisations ou du nombre de passagers. A découvrir sur le lac Léman (Evian, Yvoire, Thonon et Lausanne) ou encore aux Embiez pour une promenade en mer Méditérannée.
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